
Category Archives: Découvertes et courbatures
Les biquettes, la piste et le complot
Ce matin-là, Mildura avait triste mine. La ville alignait ses trottoirs en une longue rangée maussade, pâle et grise d’un lendemain de soirée trop arrosée. Le ciel aussi avait sa tête des mauvais jours. Il grognait un peu dans le lointain et fronçait des nuages d’un air menaçant. La piste menant à Mungo NP n’était pas en reste et avait déployé la panoplie complète d’un petit matin chagrin : flaques, nids de poules, boue et ravines s’étaient répandues en chemin comme la Vegemite sur une tartine beurrée. Qu’importe ! Parapluies, pulls et imperméables avaient été soigneusement glissés dans les bagages, il faudrait plus qu’un ciel menaçant et une piste peu engageante pour entamer la bonne humeur régnant dans la voiture. C’est que, tout de même, ce n’est pas tous les jours qu’on est sur le point de visiter un parc national classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO. Foin de nids de poules, haro sur les flaquelettes, ne faisons pas attendre plus longtemps Mungo Man et Mungo Lady.
[vidéo] Comme un saphir mouillé
Deux jours sur la Sapphire Coast, à guetter les baleines, à arpenter des plages plus sauvages les unes que les autres, à boulotter du fish’n chips et des Snakes. Mais surtout deux jours à slalomer entre les gouttes, les averses et les sacs d’eau…
Ca vous dit ? Allez hop ! en voiture !
A vos marques, prêts, palétuviers !
(Inskip Point, QLD, 10-09-2011)
A Inskip Point, les racines de palétuviers poussent en rangs serrés, envoyés spéciaux des troncs qui somnolent un peu plus loin à l’ombre des filaos, taillant une bavette alanguie avec quelques palmiers tout aussi nonchalants. Et toutes ensemble, elles jouent les périscopes de bord de plage, surveillant qui la marée montante (sortez les tubas !), qui les promeneurs pas très vaillants du dimanche matin, rescapés titubants d’agapes un peu trop joyeuses (planquez les jeunes pousses !). Les plus aguerries sont chargées de guetter l’arrivée des 4×4 qui filent pot d’échappement à terre en direction des bacs qui les mèneront jusqu’à Fraser Island et ses dunes-terrain de jeu, veillant à la santé mais aussi à la bonne conduite de leurs subalternes : hors de question d’aiguiser ses pointes pour attenter à la vie d’un pneu, ce ne serait pas digne d’un palétuvier.
On ne se bouscule pas au portillon pour ce poste précis, chez les racines aériennes… C’est que ce n’est pas un poste de guet de tout repos : parer aux coups de volant intempestifs n’est pas un jeu de racine née de la derniere marée, toute échasse qu’elle soit, qu’on se le dise ! Et ce sont donc les plus gradées qui s’y collent, gérant flux et reflux de leurs petites troupes racinaires et aérifères d’une main de maitre. Qui a dit que les palétuviers avaient la belle vie, à lézarder sur la plage du matin au soir ?
Almost Gold Coast
(Springbrook NP, QLD, 07-09-2011)
A Springbrook NP, de très bon matin, si on arrive à s’extirper du sac de couchage sans s’entrouper, à ouvrir suffisamment les yeux pour éviter les wallabies qui jaillissent de tous côtés sur la route et à résister à l’absence terrible de café, on peut profiter d’un lever de soleil mi-brumeux, mi-merveilleux, en frissonnant un peu dans l’air frisquet du petit jour. Si on a vraiment de la chance, on peut apercevoir les silhouettes de la Gold Coast se dresser dans le lointain, comme une rangée de quenottes mignonnes, joyeusement dépareillées et plantées de guingois sur l’horizon. Et c’est joli. Si joli qu’on en aurait presque envie d’aller faire un petit tour voir par là-bas si nous y sommes…
Hallebardes et vieilles chandelles
Une escapade de deux jours sur la Sapphire Coast, c’est :
- trois états empruntés et 875 kilomètres parcourus,
- ne pas entendre le réveil sonner aux aurores le samedi matin et donc partir en quatrième vitesse, les cheveux en bataille et le sac à peine bouclé,
- semer pour la peine une paire de chaussettes et un tube de dentifrice dans les escaliers du garage,
- retrouver un semblant d’activité neuronale dès la première gorgée de café avalée,
- filer cheveux au vent sur la Snowy Mountains Hwy en chantant (faux) à tue-tête,
- s’arrêter à Pipers Lookout pour admirer la vue et feliciter chaleureusement le courageux cycliste qui s’est lancé à l’assaut de la Great Dividing Range,
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[vidéo] Another rainy day in paradise
Deux jours à Jervis Bay sur un coup de tête. De la pluie, des averses, du crachin et des sacs d’eau. Mais aussi des pélicans, du sable blanc et des cheveux au vent… et quelques coups de soleil malgré tout. On vous embarque pour la balade ?
Once upon a bridge
A Narrandera, tout au bord de la Sturt Highway, il y a un vieux pont qui regardait autrefois passer les trains. Les traverses ne tiennent plus très bien debout, les piles tremblotent un peu lorsque la brise souffle en rafale et les rails se sont dentelés de rouille en piquetis. Il y a bien longtemps que les trains l’ont délaissé, préférant d’autres ponts plus pimpants et moins craquants.
Depuis, il regarde passer les road trains et pousser les graminées en bord de route. Il a beau bougonner et craquer de désapprobation, il aime bien observer le ballet incessant de la highway. Oh ! il ne l’avouera jamais mais il trouverait même presque ce nouveau spectacle plus réjouissant que ses trains. C’est que les trains de marchandises, quand on en a vu un, on les a tous vus.
Parfois, il raconte aux eucalyptus qui l’entourent sa vie d’avant, de grand pont célèbre, cette vie qu’ils n’ont pas pu connaitre, ayant poussé trop tard. Il radote un peu, s’invente des aventures immobiles haletantes, pleines de cyclones, de dangers et de déraillements évités in extremis grâce à son incroyable dévouement de pont hors du commun. Tout absorbé qu’il soit par ses contes du temps jadis, il ne manque jamais de s’arrêter pour admirer un autre de ces road trains qu’il s’interdit d’apprécier à voix haute. C’est qu’il a sa dignité de vieux pont retraité des chemins de fer, tout de même. Et tant pis si tous ceux qui l’entourent ne sont pas dupes, il continuera à hausser les traverses d’un petit air blasé, soupirant et grommelant à chaque coup de klaxon, cachant malicieusement le bonheur qu’il ressent à saluer le passage de ses road trains sous une couche épaisse de ronchonnements grincheux, en bon vieux pont grognon qu’il est.
Waiting for the warmth of that tender storm
(Tin Can Bay, QLD, 09-09-2011)
A Snapper Creek les soirs d’orage, tout au bout de la jetée, si l’on guette bien, on peut apercevoir quelque facétieux lutin sautillant virevolter et pirouetter gaiement sur le ciel lourd de gouttes d’eau mûres à point.
Tendez l’oreille, rapprochez-vous. Là, juste là, oui. Ne bougez plus. Entendez-vous grelots et clochettes cousus au fil de brume sur son bonnet tinter, emportés par sa danse échevelée, et se mêler au murmure du vent et au souffle lent des cocotiers qui soupirent d’aise ? Sentez-vous les vagues vous chatouiller les orteils et sous vos pieds la jetée qui s’étire et craque de bien-être ? Une hirondelle vient de filer, l’avez-vous passer, tout absorbée par la course-poursuite haletante qui l’oppose à de fort vaillants moustiques ? L’air se teinte déjà des parfums suaves de la terre humide et du jasmin à peine fleuri qui se répand en volutes capiteuses humées à petites gorgées gourmandes. Bienvenue à Tin Can Bay !
If you held yourself up to the light
(Springbrook NP, QLD, 07-09-2011)
Le ciel pétillait d’étoiles tintinnabulantes, la brume s’accrochait aux feuilles à peine nées et les bandicoots s’apprêtaient à plier bagage. Ils ne résisteraient plus guère à l’appel pressant du terrier. Les fougères agitaient leurs petites crosses, minuscules poings verts blottis fermement dans un sommeil de point du jour. Les graviers du bord de route s’étiraient et regardaient sautiller les wallabies de poche, hauts comme trois grains de filao. Le soleil chatouillait les sous-bois sans même vraiment y penser, baillant aux lyrebirds, rêvant d’un petit cocon de nuage où poser ses rayons quelques instants. C’est qu’il était rudement tôt et que la nuit avait été bigrement fraîche.
[vidéo] (9) Days of Spring
Et hop ! en voiture, Simone Thèse pour un petit interlude vidéo avant de reprendre, dès demain, nos pérégrinations vadrouillesques diverses et variées. Enjoy!