Un murmure si Pacifique

(Caves Beach, NSW, 23-01-11)

Le soleil nous avait réveillés d’un chatouillis sur les paupières avant de nous accompagner la journée durant, plongeant Murrays Beach dans une brume de chaleur, entourant les baigneurs d’une douce torpeur et imprimant l’ombre des filaos sur la petite crique de sable blanc.

Soudain les nuages ont exigé leur part de ciel, l’orage a grondé dans le lointain, puis plus près, bientôt tout près de notre petit recoin de plage. Le vent s’était levé, pliant sans effort les eucalyptus et chassant les mouettes vers un abri plus sûr. Nous avons bien vite rattroupé serviettes, crème solaire, livres et glacière et, cahin-caha, glissant dans nos claquettes ensablées, nous avons rejoint la voiture. Les premières gouttes s’écrasaient déjà, furieuses, trombes de petits poings rageurs martelant sable, carrosserie, feuilles et peau.

Le rideau de pluie s’est déchiré à l’instant où la piste est redevenue route et nous avons bifurqué, au petit bonheur la chance, guidés par les seuls échos qu’un nom semblait réveiller, promesses tout juste esquissées de beauté à venir. Une petite forêt de banksia et d’eucalyptus entremêlés  et Caves Beach nous tendait les bras, déroulant grains de sable rugueux, coquillages émoussés par les courants, mouettes hautaines et falaises moussues. Les vagues murmuraient aux rochers des histoires d’eau, de sel et d’écume. Les chuchotis ne parlaient pas d’océans. Non, ils ne racontaient que le Pacifique. Ce Pacifique qui se parait de plomb, écho liquide des nuées d’orage qui le couvaient du regard, océan au regard noir ayant soudainement tout oublié des eaux douces et transparentes dont il se flattait si peu auparavant. Ce Pacifique, reflété dans le ciel, étendue dont nous ne savions plus ni le commencement ni la fin, tempêtant doucement au bord de nos orteils.

Un éclair a fait voler en éclats l’attente figée unissant mouettes, vagues et promeneurs qui s’accrochaient aux lèvres de l’orage. Le rideau de pluie s’est à nouveau refermé sur la baie, balayant sans distinction la plage, l’instant et sa magie. Le mouvement a alors repris ses droits : un battement d’ailes et les mouettes s’étaient abritées, une cavalcade et les humains retrouvaient la chaleur de l’habitacle. Les coquillages, eux, attendraient sereinement que la pluie cesse, nichés dans le sable, savourant le chatouillis des gouttes sur leur coquille.

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