Le péril chlorophylle
Si on laisse de côté les images d’Epinal (kangourous choupis, plages superbes, fonds poissonneux et surfeurs tout bronzés, étendues désertiques où la main de l’homme n’a pas encore mis le pied – merci les Canadiens !), l’Australie évoque à tout un chacun de drôles de bestioles pas forcément très sympathiques. Effectivement, entre les charmants octopodes au venin mortel (araignées et scorpions), les serpents non moins efficaces quand il s’agit d’estourbir (ou plus si affinités) un humain qui passe par là, certaines tiques dont la morsure peut également se traduire par un aller simple vers la caisse à savon en sapin, les attaques de requin, les méduses qui laissent traîner leurs tentacules venimeux n’importe où, les coquillages dont la piqure peut réserver quelques surprises des plus douloureuses, on peut à juste titre s’estimer gâtés par la nature. A cette première liste, il faut bien évidemment rajouter les magpies, tenues pour responsables du taux record de trépanation mesuré sur le territoire et ne pas oublier les possums qui, pour tout mignons qu’ils soient, se classent, l’air pollué de rien, dans le top ten des armes de destruction massive des muqueuses olfactives.
Qu’à cela ne tienne, pensez-vous, il suffit de se tenir à l’écart de ces affreuses bestioles. Malheureux ! Les dangers liés a la faune locale ne sont que la partie émergée de l’iceberg… La véritable épée de Damoclès se camoufle, fourbe et ricanante, dans les frondaisons, se love silencieusement entre les branches et vous épie, humain inconscient qui passez en sifflotant à portée de feuille. Car oui, bien loin devant les attaques de requin, les morsures d’arachnides ou autres piqures de méduses, le premier danger « naturel » auquel on s’expose en Australie n’est autre que… la chute de noix de coco. Alertés par notre très cher monsieur du Muguet de la grave menace pesant sur nos boites crâniennes, quelle joie de nous apercevoir que nous ne croiserions pas le moindre cocotier ni le plus petit bout de noix de coco dans notre vie de tous les jours ! Le casque à pointe pouvait donc dormir à poin(te)gs fermés dans le placard.
Las ! Notre joie ne fut que de courte durée… Si le climat arctique de Canberra nous protège de toute invasion cocotière, un autre danger nous menace, plus sournois encore. Car sous ses airs nonchalants, malgré les doux murmures de la brise dans ses feuilles et la capiteuse odeur dont il abreuve l’atmosphère au moindre rayon de soleil, l’eucalyptus se révèle une brute redoutable, agissant de sève froide. Les températures baissent ? Paf ! une branche de tombée ! Une petite bise ? Et vlan ! encore une chute ! La sécheresse menace ? Crac ! en voilà une autre par terre ! Il pleut ? Badaboum ! au tour du tronc de s’affaler brutalement au sol, sans crier gare. Au diable voitures et piétons qui passaient par là !
Pire encore peut-être, l’eucalyptus, qui a plus d’un tour dans sa branche, s’acoquine régulièrement avec un larron dont l’air innocent camoufle une arme chimique à l’efficacité proverbialement reconnue de Darwin à Hobart. Quiconque passe sous un eucalyptus, s’il a la chance de ne pas subir de soudaines envies d’ébranchage, doit se méfier comme de la peste des koalas se sustentant, perchés dans le feuillage. Car quand koala content, lui toujours faire comme ça nourri, lui toujours faire pipi. Or, pas de bol, le Destop fait pâle figure comparé à l’urine de koala , de la vulgaire piquette sans envergure… En cas de malchance carabinée, votre passage sous un eucalyptus pourrait donc vous valoir d’être transformé en crumpet : plat et plein de trous… Triste fin !