Elémentaire, mon cher Watson !
(Watson Bay, Sydney, NSW, 10-04-2011)
Le ferry sautillait de ports miniatures en jetées minuscules, fendant une eau de porcelaine. Lové sur les genoux de son père, un petit garçon ouvrait de grands yeux pleins de questions et d’émerveillements, fasciné par les hydravions, les îles si petites qu’elles en devenaient jouets et les centaines de bateaux mouchetant la baie. Une ribambelle de façades délicatement blotties les unes contre les autres, quelques rochers assiégés par l’écume, des grains de sable en pagaille, dispersés en mignonnes plages de poche et le ponton de Watson Bay dansait déjà sous nos pas. Une bien jolie baie, nichée dans l’ombre des magnolias et des eucalyptus, contemplant la ligne ciselée des gratte-ciels du centre-ville. Une bien jolie baie, certes, mais pas le coup au cœur attendu. Où se cachait donc ce petit morceau de bout du monde dont on nous avait dit tant de bien ? Au sommet de la colline, peut-être ? Hum ! Pas sûr du tout mais au moins, on aura une meilleure vue sur la ville, on devrait surplomber la cime des arbres.
Quelques pas dans l’herbe, une petite route, un coup d’œil jeté distraitement au-delà des rambardes… et un grand coup au cœur, enfin ! The Gap déployait ses falaises et ses à-pics, découpant ses aplombs acérés sur un ciel se teintant d’orage. Les vagues s’échouaient bien en-dessous de nos pieds, mouchetant les rochers de dentelle écumante. Le vent soufflait doucement, creusant, apposant inlassablement sa patte sur les parois toutes ourlées de délicates alvéoles. Chaque souffle de brise rattroupait quelques nuages supplémentaires qui se massaient, grisonnants et menaçants, au-dessus de l’Opera House. Cheveux en pagaille et main fermement posée sur un chapeau aux tendances indépendantistes exacerbées, les sourires mis en boîte se succédaient, qui choisissant la rondeur bleutée de l’océan ou l’horizon crénelé de Central Sydney comme toile de fond.
Quelques pas pour s’éloigner de la foule et se fondre à nouveau au paysage. Quelques pas pour sentir sa nuque picoter en s’imaginant non plus sur la falaise mais sur le pont d’un gréement craquant de tout son saoul, prêt à entrer dans la baie de Sydney. Se rêver, pour une poignée d’instants, nouvel immigrant des temps d’avant l’avion, frissonnant de joie et d’appréhension mêlées et sourire, une fois de plus, de cette si jolie chance saisie au vol.
Déjà, les feuilles frémissaient et les oiseaux s’ébrouaient, les fourmis s’agitaient follement. L’orage ne tenait plus qu’à une étincelle qui ne tarderait guère. Le ferry ne nous attendrait pas, il fallait déposer là les rêveries, se diriger à pas pressés vers le ponton, laisser derrière nous le jeune banksia et son ombre accueillante pour retrouver le brouhaha murmurant de la ville. Le petit arbuste veillerait sur nos pensées émues, posées à son pied, laissées à sa garde bienveillante jusqu’à notre prochaine visite. Il nous l’avait promis.
color block la mer. Je mets une option sur la maison blanche avec un ponton.
En shared accommodation, alors, on est deja sur le coup aussi. Ca sera notre petit pied-a-terre a la campagne (ben oui, hors Canberra, c’est la campagne) (enfin, c’est ce qu’on se dit pour se consoler…)