(Pigeon House Mountain, NSW, 11-07-2011)

Les Aborigènes, y voyant un mamelon, l’avaient surnommée Didhol. Las, Captain Cook, dès son arrivée, fut formel : foin de mamelon, trêve de frivolités et d’imagination galopante, ladite montagne méritait un nom plus digne et moins affriolant. Ce serait donc Pigeon House Mountain. A vos ordres, Cap’tain’ !

Tout à ces considérations historico-anatomico-culturo-montagneuses, nous cahotions et tressautions de concert sur la piste décorée de moult nids d’émeus (de cette taille-là, il n’y a plus de poule qui tienne, foi de LaGB !). Trois heures de route dans les pneus, les chaussures s’emmêlaient les lacets d’impatience. Plus que quelques virages, un ou deux coups de volant intempestifs pour éviter une quelconque crevasse ou une branche d’eucalyptus jouant les promeneurs solitaires et le sentier faisait enfin son apparition.  Montant la garde au pied des premières marches, un panneau prenait grand plaisir à exhiber le profil aguicheur (Captain Cook a été formel, voyons !) prometteur de la balade, tout d’échelles abruptes et de courbes de niveaux en rangs serrés.

Les rides topographiques ayant tenu tous leurs engagements, c’est soufflant et suant (râlant aussi, précise LeGB) (NDLaGB : mais pas du tout, voyons), que nous sommes arrivés au pied des échelles, le vertige en bandoulière. Premières volées de marches et danse de la joie : tu parles d’échelles…
M’en vais te les redescendre les yeux fermés, moi.
Et à cloche-pied.
Voire même sur les mains, tiens, pour faire bonne mesure.
Non mais quelle idée d’indiquer cette partie comme difficile, c’est vraiment far too easy !

(Ici, LaGB lève le nez et Giuseppe verdit à vue d’œil. Quelques instants de silence. Puis…)

Dis…
c’est un autre sentier, là, hein ?
Cette échelle-là, elle ne fait pas partie des nôtres, hein ?
Non, nous, on a les faciles, les marches d’escalier avec rampe d’accès et room service, c’est ça ?
Comment ?
On a celle-ci aussi ?
Et il y a sa petite sœur un peu plus loin ?
Juste quelques barreaux (glissants) (étroits) (en dévers) (rouillés) et c’est tout (c’est tout, c’est tout, faut le dire vite, y en a du vide là en-dessous !) ?
Ah !
Ah…

Quelques nouveaux instants de silence. LaGB est piquée comme un hareng sur son bout de plateforme tout au pied du premier échelon. Une nuée de bramus miniatures d’enfants se pressant sur ses talons, l’ascension reprend son cours. Question de fierté, nom d’un wombat ! Encore quelques volées de marches et quelques traitres barreaux, le sommet est enfin là, venté, glacé, superbe. Des boulders matelassés de lichens, des eucalyptus tordus par les vents, tout moustachus et barbus de mousses jaunies, des currawongs qui piquent du bec dans les courants et un paysage qui s’offre à perte de vue. Au milieu du ciel bleu de froid, un tout petit mouton de nuage pour tenir compagnie à Thèse.

Lake Tabourie, Kioloa et Ulladulla au bout des doigts, la canopée sous les pieds, un Mars sous la dent… et ça repart ! LaGB le jurerait, les échelles se sont déplacées subrepticement, s’allongeant démesurément tout en travers du précipice. Les barreaux se sont sciés, à n’en pas douter. Millimètre après millimètre, les yeux rivés droit devant, les jambes raides et flageolantes à la fois (tout un art), les neurones flagada et le fou-rire aux lèvres, la descente s’écoule, aussi longue qu’un hiver canberrien…

De retour à la terre ferme et à la voiture, il faudra bien se rendre à l’évidence : les courbatures lagbiennes les plus carabinées sont toutes nichées dans les épaules (nous ne mentionnerons pas ici que LeGB n’a eu aucune courbature, rien, peanuts. Non, nous ne le mentionnerons pas). LaGB se serait-elle accrochée à son échelle comme une patelle à son rocher ?