Et la tendresse (bordel) ?

(A Life of Grief)

Tony, mon petit Tonynounet (tu permets que je t’appelle comme ça, dis ?), mon chouchou,

Je dois te l’avouer, je suis un peu chafouine. Et ça me tracasse. Parce qu’être chafouin, c’est mauvais pour le teint (tagada tsouin tsouin).

Comment ? Tu te demandes bien pourquoi la chafouinerie m’envahit ? Hé bien mais c’est fort simple, Tony, mon petit. Il se trouve, mon Tonychou, que tu pousses les bornes des limites du bouchon un peu loin sur la moutarde du haricot qui me monte au nez.

Je ne sais pas qui a eu la brillante idée de t’offrir des soldats de plomb pour Noël mais je ne le/la félicite pas. Comment, qu’est-ce que tu dis ? C’est le Papa Noel ? Eh bien, je ne te félicite pas, Père Noel ! Parce que bon, jouer à la guéguerre avec des figurines et  des pistolets à eau dans le backyard, c’est rigolo. Continuer à faire de même une fois devenu premier ministre et confondre les eaux internationales avec son bout de jardin, ce n’est pas très malin. Vraiment, je t’assure.

C’est qu’en tout juste quelques mois, Tony, mon bichon, tu as réussi à te mettre à dos l’Indonésie,  faire tousser Human Rights Watch et froncer le sourcil à Amnesty International, rien que ça. Tu ne veux pas plutôt ressortir ton maillot moulant de Lifeguard, dis ? Et ton petit bonnet de bain par la même occasion. Je te l’accorde, il est ridicule, ce petit bonnet. Mais tu sais, à tout prendre, je crois que tu es moins ridicule avec ton petit bonnet collé sur le crâne qu’en vociférant tes grands « la lutte contre l’immigration clandestine est une véritable guerre ». Le bonnet te donne l’air un peu niais, c’est vrai mais c’est largement préférable aux discours de général de bac à douche dont tu nous abreuves ces dernières semaines.

Il y a quelques mois, tu nous as promis, juré, craché (au passage, je te l’ai déjà dit cent fois, ce n’est pas bien de cracher), il n’y aurait très vite plus de bateaux de réfugiés qui arriveraient sur les côtes australiennes. Tu as sorti tes petits muscles, tu as couru partout en agitant les bras. Et puis tu as dû te rendre compte que, finalement, ce n’était pas forcément si facile que ça.

Alors, juste après Noël, tu as décidé de frapper un grand coup, tu as même eu une idée de génie (enfin… Faudrait quand même voir à remplacer l’ampoule, hein, mon génie sans frotter parce que bon, ce n’est pas non plus l’idée du siècle, tu sais). Tu as décidé, pof ! en deux coups de cuiller à pot, de dorénavant remorquer les bateaux de réfugiés directement en Indonésie. Comme ça, pas la peine de se tracasser avec de sombres histoires de centres de détention vétustes ou dangereux, pas d’association qui râle parce qu’on laisse des enfants en détention, qu’on sépare des mères de leurs nouveau-nés malades ou qu’on ne soigne pas des gens en grande détresse physique et mentale.

Non, vraiment, en voilà une idée qu’elle est brillante, effectivement, Tony. Cacher la poussière sous le tapis, ça marche super bien, tout le monde te le dira. Même que quand on a de la chance, la poussière finit par disparaitre toute seule. C’est sans doute pour ça que tu as demandé à ton ministre de l’immigration d’annoncer qu’il n’y aurait plus de point presse hebdomadaire mais qu’il n’interviendrait que lorsque le besoin s’en ferait sentir.

Sauf que… Sauf que, mon pauvre Tony darling, sur ce coup, tu n’as pas eu de chance. C’est vrai, quoi, qu’est-ce que c’est que cette sombre histoire d’eaux territoriales indonésiennes ? Depuis quand faut-il demander l’autorisation d’un pays pour rentrer dans ses eaux à lui qu’il a ? Non mais franchement !

Et puis en plus, vraiment, le gouvernement indonésien est méchant tout plein, il râle aussi parce que, si les bateaux sont partis de ses côtes, les réfugiés qu’il y a dedans ne sont pas indonésiens et n’ont donc pas grand’ chose à faire là-bas. Oui, je sais, c’est très agaçant, mon Tony, tu essaies de faire les choses bien et paf ! Soit dit en passant, d’ailleurs, c’est légèrement illégal, de faire ça, tu sais ? Comment ça, tu t’en fiches, d’abord ?

Ça fait déjà beaucoup, mon Tony doux, tu sais. Ce genre de lubie que tu cultives commence à faire de l’Australie la risée du monde. Enfin, quand ledit monde ne fronce pas le sourcil d’un air très désapprobateur. Oui, je sais, tu t’en fiches un peu des élucubrations de ces hippies enfumés de droitdelhommistes. Mais quand même, ça aurait été bien de freiner ton char, mon Ben-Hur.

Le gros souci, c’est que tu ne t’es pas arrêté en si bon chemin. Je vais finir par croire que tu en veux vraiment à mon teint et à ma digestion, tu sais. La dernière tonnerie en date ? Se gausser (OK, on te l’accorde, c’est ton ministre de l’immigration qui l’a dit, pas toi) des déclarations de réfugiés qui auraient été maltraités par l’armée australienne en charge de renvoyer les bateaux dans les eaux indonésiennes sans autorisation préalable. Pas de demande d’enquête, non, rien qu’une tirade fiché droit dans ses bottes à base de « mais c’est forcément n’importe quoi ». Sauf que, Tony, mon biquet, les témoignages sont concordants et l’Indonésie a, elle, ordonné l’ouverture d’une enquête. Avoue que dix jours après que la marine australienne ait procédé à des tirs de sommation lors de l’arraisonnement d’un bateau de réfugiés, ça fait désordre. Pour ne pas dire plus.

Donc, Tony, mon grand pioupiou, tu vas me faire plaisir, tu vas gentiment laisser tes soldats de plomb dans leur boite et tu vas vite aller te (re)plonger dans « Alain Decaux raconte les droits de l’homme aux enfants » et « Le droit international pour les nuls ». Oui, je sais, il n’y a pas beaucoup d’images et c’est écrit petit mais je t’assure que tout le monde sera très fier de toi si tu les lis.

2 thoughts on “Et la tendresse (bordel) ?

    • lagrandeblonde Post author

      De rien ! J’avais la fumee qui me sortait des oreilles depuis trop longtemps, fallait que ca sorte…

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