Daphné du Maurier n’a rien inventé…
L’Australien est sportif, c’est un fait. L’Australien court, nage, pagaie, plonge, joue au footy (spécialité locale, mais pas culinaire donc pas intéressante, on en reparlera quand on aura compris les règles). Ou regarde les retransmissions de matchs à la télé une bière à la main…
En bon sportif, l’Australien se rend donc sur son lieu de travail en vélo (si Canberra a un réseau de bus moins développé que celui de Saint Trifouillis les Andouillettes, le réseau cyclable est en revanche tout bonnement fantastique). En bon sportif toujours, l’Australien s’équipe de façon optimale, alliant de ce fait praticité et confort lors de ses déplacements bi-quotidiens. Matin et soir, c’est donc un festival de seringues hypodermiques de mollets fuselés (et de fessiers charnus) nichés dans des cyclistes ajustés.Vu les regards appréciateurs et les sourires en coin surpris aux passages piétons, nombreux sont ceux qui apprécient à leur juste valeur les efforts vestimentaires des adeptes du deux roues. Bénis soient le lycra et le Goretex !
Malheureusement, tout a une fin sauf la banane qui en a deux : après un mois de plaisir des yeux quotidien, septembre et son lot de désillusions sont arrivés… Vos yeux écarquillés ne peuvent plus dorénavant que contempler, éperdus, inconsolables, le désastreux couvre-chef adopté à la quasi unanimité par nos insensés cyclistes. Foin de jolis mollets bien dessinés, vous ne pouvez vous détacher de ces coiffes tentaculaires, bondissant à chaque coup de pédale, céphalopodes incongrus arpentant sans relâche trottoirs et pistes cyclables. « Mais pourquoi ????? » hurlez-vous, hagard, la bave aux lèvres, alors qu’un énième épouvantail surgit devant vos yeux effarés.
A cet instant, détournant la tête, désespéré, vous croisez le regard torve et sanguinaire d’un magpie. La bête féroce vous toise de toute sa hauteur (20cm), vous scrutant d’un air de propriétaire dédaigneux et semble vous demander des comptes à vous, l’impudent qui osez passer sous son arbre, fouler du pied son herbe et respirer quelques bouffées de son air. Soudain, tout s’éclaire, les antennes des cyclistes ne vous laminent plus la rétine, vous sautez même sauvagement sur le premier innocent deux-roues qui passe, lui arrachez violemment son casque décoré de serre-joints (z’ont essayé mais c’était un poil trop lourd, un freinage un peu trop zélé et vlan ! deux dents en moins) colliers de serrage et vous en harnachez illico avant de fuir à toutes jambes, agitant les bras et hurlant à vous en friser les cordes vocales.
Car oui, septembre rime avec croc en jambe printemps et qui dit printemps dit oiseaux qui nichent. Or les magpies, qui ont à l’année une réputation solidement établie de bestioles pour le moins peu aimables, sont considérées comme de véritables harpies lors de leur période de reproduction. Non seulement tout ce qui les entoure est leur propriété exclusive (ces oiseaux ont la faculté assez incroyable de vous faire sentir d’un seul regard intrus dans votre propre jardin) mais quiconque approche à plus de 15 mètres de l’arbre dans lequel ils nichent est considéré comme une menace potentielle pour leur descendance, valant à l’infortuné une attaque en piqué pas piquée des vers.
Le hic ? Les rues sont plantées d’arbres espacés d’une dizaine de mètres uniquement, rendant mathématiquement impossible d’envisager un quelconque déplacement sans encourir les foudres simultanées de trois familles magpies… Tous aux abris !