Quelques instants avant Twenty Eleven
31 décembre 2010, sur la route de Jervis Bay…
- 11 heures 37 : obéissant aux injonctions des panneaux « Stop Revive Survive » et aux sommations d’un estomac qui crie famine malgré un petit-déjeuner très copieux et plutôt tardif, nous quittons la Federal Highway pour un petit crochet par Goulburn, première ville australienne construite à l’intérieur des terres. Au détour d’un virage, notre mouton adoptif s’est brusquement senti pousser des cornes ailes, subjugué par le Big Merino… LaGB, elle, est tombée raide devant des manteaux présentés dans la boutique du Gras Mouton, manteaux-qui-seraient-super-pour-ne-pas-avoir-froid-cet-hiver-et-puis-c’est-local-comme-les-Ugg-c’est-moutonnement-vachement-important-de-consommer-local-faut-soutenir-l’économie !
Une fois repartis, l’estomac à nouveau calé, mouton et humaine bêleront aux currawongs bailleront aux corneilles de concert, rêvant qui à sa splendeur future (avec une chouette paire de cornes et un joli pelage douillet crânement porté), qui à son manteau à venir (avec une chouette paire de bottes et un joli bonnet douillet crânement porté). LeGB, quant à lui, savourera, une fois n’est pas coutume, une petite plage de silence… qui ne durera pas !
- 12 heures 45 : Moss Vale, un rond-point, deux possibilités, trois demi-tours… LaGB fait la leçon à une carte récalcitrante sous l’œil moqueur du LeGB qui sait pertinemment que les cartes ont bon dos.
- 13 heures 22 : bonheur ! les rampes descendant à Fitzroy Falls virevoltent gaiement dans un petit coin de rainforest. Fougères arborescentes et cycas parsèment de taches vert vif un sol tapissé de feuilles et d’écorces d’eucalyptus, perruches, butcher birds et eastern whipbirds s’interpellent d’un côté à l’autre de la route*. Il n’en faut guère plus pour se sentir, l’espace de quelques instants transportés un peu plus à l’ouest, presque revenus à la Réunion.
- 13 heures 53 : « oh ! regarde, le pont-levis du château de la Belle au Bois Dormant Lego ! ». Hampden Bridge, dernier pont de bois à suspension encore en service en New South Wales (et semblerait-il même, en Australie), surplombe une minuscule plage de sable nichée entre les falaises bordant la Kangaroo River, petit paradis pour amateurs de canoë en mal de paysages grandioses.
- 14 heures 30 : la descente vers Bomaderry puis Nowra (prononcer Nao-oua, en insistant sur le o) (les retours de balade sont l’occasion de cours de diction au labo parce qu’on n’a pas toujours une carte ou un crayon sous la main pour indiquer le nom des villes/villages/régions arpentées. De quoi bien faire rigoler les collègues…) se fait au rythme des (vous l’aurez deviné, le Père Noël n’ayant pas déposé de vocabulaire supplémentaire sous notre non-sapin) « Que c’est beau mais que c’est beau ! » tant la route domine et embrasse une côte brumeuse de chaleur.
- 15 heures 18 à 17 heures 22 : interlude chasse à la chambre de motel. Le gibier tant convoité nous aura fait courir de Crookhaven Heads et Culburra à Nowra, avant de capituler à l’entrée de Bomaderry. Fin de l’interlude, retour aux choses sérieuses !
- 17 heures 37 : prudence et gourmandise faisant parfois bon ménage, décision est prise de se ravitailler sans tarder. Le réveillon se fera, les papilles en ont décidé ainsi, au fish’n chips et au Coca. Ne reste plus qu’à trouver le lieu idéal à la dégustation…
- 18 heures 22 : Pacifique, nous voilà (enfin) ! Sur la route de Gerringong, Seven Mile Beach nous tend les bras… Quelques rares promeneurs, un ou deux black cockatoos ébouriffés par un petit vent frais, le voilà notre coin de réveillon !
- 19 heures 36 : assister au dernier coucher de soleil de l’année les pieds dans l’océan Pacifique, ça n’a pas de prix, pour tout le reste, il y a Mastercard et c’est la ville de Gerroa, blottie tout au bout de Seven Mile Beach qui nous l’offre…
- 21 heures 00 : tomber, au hasard d’une rue, sur la minuscule fête foraine que Berry organise chaque 31 décembre, au moment-même où les premières fusées s’élancent, tient de la magie : tout petit feu d’artifice salué par des centaines de « oh ! » et de « ah ! » unissant dans l’émerveillement enfants et adultes, tout petits manèges ravissant petits et grands et profonde sensation de sérénité semblant irradier de la foule tout entière.
(On ne plaisante pas avec les taxes, même pour les manèges…)
- 22 heures 34 : de retour au motel, le chemin menant à la chambre crisse de hannetons… Ca promet, vu les jours sous la porte et autour de la fenêtre…
- 22 heures 43 : « Si je m’endors avant minuit, tu me réveilles ? »
« Rrrrrfffffllll »
« Bon, ben, à l’année prochaine, alors… »
- 23 heures 12 : premier hanneton d’une longue série à visiter notre chambre, volant longuement et poussivement d’un côté à l’autre de la pièce puis s’arrêtant, bien évidemment, au pied du lit, ronflant des élytres suite à l’intense effort fourni. Si nous n’avons pas entendu les douze coups de minuit, nous aurons en revanche fort bien profité des 348 vrombissements de 23 heures 12, 23 heures 38, 00 heures 17, 00 heures 21 et ainsi de suite jusqu’au lendemain matin… Bonne (h)ann(eton)ée !
* pour vous faire une petite idée des sonorités aviaires de notre vie quotidienne, c’est par là.