Le bois, la tresse et les jolies ruelles
Nous n’avions jusqu’à présent jamais fait que traverser Braidwood, n’accordant qu’un regard distrait aux rues pimpantes, tout concentrés que nous étions sur notre impatience à retrouver les vagues, le sel, le sable et l’écume. Seuls comptaient les quelques kilomètres qui nous séparaient encore des vertigineuses rampes enrubannant la Great Dividing Range, virages serrés distribuant paysages somptueux aux passagers, crampes de concentration aux conducteurs et températures soudainement bien adoucies aux uns comme aux autres. A force de passages, cependant, quelques images avaient réussi à s’imposer : une vache pirate fort occupée à jouer les vigies sur le toit de la boucherie, des lambrequins délicats bordant des maisons tout droit échappées du Far-West.
Et un beau matin craquant de froid, nous avons renoncé aux envies de plage pour flâner nez à la bise glaciale. Il flottait dans l’air comme un petit goût de western, 1822 et ses pionniers semblaient soudainement tout près. Les trottoirs étaient presque déserts, quelques rires s’échappaient du Albion Hotel, des odeurs alléchantes de pies tout juste cuites colonisaient la rue et nos narines, quelques rosellas se chamaillaient perchées dans un rosier. Il faisait bon errer de vitrine en terrasse, se hausser sur la pointe des pieds pour entr’apercevoir une parcelle minuscule des décors du théâtre de la ville, s’assoir sur un banc baigné de soleil et détailler balcons et arcades minutieusement sculptés. Puis s’installer à une table du Royal Café, frissonnant, les oreilles et le nez rougis de froid, choisir au petit bonheur la chance deux hamburgers parmi la multitude proposée et leur décerner dès la première bouchée la première place sur le podium des burgers extra. S’attarder encore un peu, rire à la vitrine des « Bons Bonbons Bouillis », pousser la porte de la galerie d’art puis prendre le temps de siroter un cappuccino au Cafe Deli, plongés dans une douce rêverie faite de soleil et de jolies images.
Nous n’avions jusqu’à présent jamais fait que traverser Braidwood… A n’en pas douter, nous saurons dorénavant nous y arrêter, les vagues, le sel, le sable et l’écume sauront bien nous attendre quelques instants supplémentaires !