Le crabe aux (presque) pinces d’or

(Mais où est donc Ornicar se cache donc Sébastien ? )

La dernière marée l’a déposé là, plouf ! d’un coup de vaguelette. Et il va lui falloir attendre, encore une fois, que l’océan daigne à nouveau s’étaler sur les rochers pour pouvoir se tirer d’affaire. Et, enfin et surtout, se délasser les pattes et les pinces. C’est qu’être un petit crabe de rien du tout, aux petits yeux si doux, un petit crabe tout orangé, tout tendre sous une carapace croquante, un petit crabe coincé dans une anfractuosité de rocher perdu en pleine mangrove à marée basse, ce n’est pas une sinécure. Les mouettes ne sont jamais bien loin et il semble qu’elles apprécient tout particulièrement le croustillant d’un petit crustacé de bon matin. Sans même parler des pélicans chez qui il se murmure du coin du bec que la meilleure façon de devenir aimable (et d’avoir les cuisses roses), c’est de boulotter du tourteau tout orangé et frais pêché.

Alors, il prend son mal de petit crabe égaré en patience, les pattes croisées, les pinces fermées, l’air renfrogné et l’œil aux aguets. Cette fois-ci, le voilà coincé entre trois feuilles d’eucalyptus, deux vieux morceaux de coraux qui ont vu des jours meilleurs, une coquille de moule aussi barbante qu’elle est barbue, quelques aiguilles de filaos, un escargot de mer qui divague un peu, quelques algues bourrues et des cristaux de sel qui jouent les vedettes et brillent de mille feux. Y a pas à dire, il a déjà connu compagnie plus joviale… M’enfin, de toute façon, c’est toujours les plus enjoués qui se font remarquer et qui finissent bien vite au fond du gosier d’un quelconque piaf. Autant s’ennuyer quelques heures comme une patelle échouée sur le sable…

D’ailleurs, tiens, pour passer le temps, voilà ce qu’il va faire, une fois de plus. Compter les grains de sable. Comme certains, parait-il, comptent les moutons. Ou d’autres les crabounets tout frais gobés. Ouh ! Que voilà donc une affreuse pensée ! Une de celles à le faire frissonner sans retenue et tricoter follement des pattes, une de ces horribles idées juste bonnes à lui faire jouer des castagnettes avec ses pinces. Ce qui n’est vraiment pas bien malin alors qu’il vient de se jurer immobilité jusqu’à la prochaine marée… Un petit étirement de pinces pour se détendre, une ou deux amples inspirations et hop ! le voilà à peu près rassuré.

Un coup d’œil à droite, un coup d’œil à gauche, un petit œil par-ci, un autre par-là, pas de mouette à l’horizon, c’est bon, il peut se mettre a compter pour de bon. Et oublier toutes les autres façons de compter, toutes celles qui impliquent des petits crabes réduits en pâtée. Comme ça, il passera le temps plus facilement et bien vite, il pourra se retrouver sain et sauf à l’abri, sous l’océan. Parce que sous l’océan, y a pas d’ court-bouillon, pas de soupe de poisson. Sous l’océan !

3 thoughts on “Le crabe aux (presque) pinces d’or

  1. La Ptite Lilie

    Quand la sardine biguine des biguines,
    Çà balance, çà swingue !
    Ils ont du sable, çà c’est certain,
    Nous le jazz-band et tous les copains !

    On a les clims clams,
    Pour faire une jim-jam,
    Sous l’océan !

    Mais tout cela ne nous dit pas où est Polochon!!!
    Les limaces des mers,
    Au rythme d’enfer,
    Sous l’océan !

    Pauvre petit Sébastien !!!

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    • lagrandeblonde Post author

      On se le demande bien ! Remarque, heureusement pour lui qu’il n’etait pas coince aussi a maree basse, il aurait un peu seche de la nageoire…

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