Champs de fraises pour toujours

(Où l’on prend des nouvelles, entre autres, de Jean-Rémi les vers de terre)

Il y a tout pile deux mois, on vous entretenait de folies printanières, jardinières et vers de terre. Et depuis, hum, depuis ? Que sont donc devenus Jean-Rémi les vers de terre et leurs potes les tomates ? vous demandez-vous sans doute, le front soucieux, la mèche pensive, le regard inquiet. Et le plaid (ou le paréo, ne négligeons donc aucune latitude) soigneusement drapé autour des épaules.

L’été est arrivé, sans s’presser. Il a un peu traîné des savates, son aîné de l’an dernier lui a trop bien expliqué combien il est utile de se faire désirer, quand on est l’été. Mais, plus sage ou plus  impatient que son auguste (et affreux) confrère, il semble bien décidé à faire savoir qu’il est revenu. 36 degrés ces quatre derniers jours, le mercure a eu quelques sueurs froides, il n’était plus guère habitué à monter ainsi dans les aigus… De quoi frire sur place et sans attendre quelques téméraires vers locataires qui s’étaient échappés belle de leur worm farm pourtant si douillette. Rest in peace, les Jean-Rémi tout frits, tout cuits. Les fourmis vous disent merci.

Mais aussi et surtout de quoi régaler nos verts locataires qui eux s’en donnent à cœur joie, fleurissant, poussant et rougissant de concert. Le backyard tient plus de la jungle que d’autre chose désormais. C’est qu’il s’y presse maintenant une véritable ménagerie à chlorophylle… Par le plus grand des hasards et complètement à l’insu de notre plein gré, se sont rajoutés aux quatre pieds de tomates, à l’aubergine, aux carottes, aux betteraves, aux fraises, aux petits pois, au piment et à la menthe, au thym, au basilic et au persil, se sont donc rajoutés de l’origan, de la menthe vietnamienne-qu’est-tout-de-même-pas-terrible-du-tout-dans-les-mojitos-tout-fout-le-camp-ma-pov’-Lucette-si-on-ne-peut-même-plus-faire-confiance-à-la-menthe-pour-bien-s’entendre-avec-le-rhum-où-va-t’on-mais-où-va-t’on-je-vous-le-demande, deux autres pieds de tomate, rejetons émérites des rachitiques productions de l’année passée, quelques fleurs-qu’on-ne-sait-pas-trop-ce-que-c’est-mais-qu’elles-sont-fort-jolies-et-qu’elles-aiment-le-soleil-ça-tombe-bien-on-n’en-manque-pas, de la coriandre, un lupin qui a déjà déclaré forfait, le fourbe ! et puis un pied de groseilles à maquereaux, de la verveine, de l’herbe à curry-parce-que-c’est-si-joli-et-que-ça-sent-tellement-bon.

Sans oublier une nouvelle plante native, dont on a déjà oublié le nom mais qui pousse à n’en plus finir. Cette fois, c’est sûr, c’est décidé, c’est certain et c’est irrévocable, tu m’entends, c’est plus qu’une évidence, c’est comme un ouragan (pardon) (le dimanche soir, on a des références musicales assez dramatiques), on n’achète plus une seule plante pour le jardin. Croix de bois, croix de fer, si je mens, on aura les pouces verts, tout ça, tout ça. A part si, bien sûr, on tombe sur des lupins en bonne forme, un baobab ou un séquoia, une épice exotique et diantrement fabuleuse, des groseilles-tout-court ou peut-être des framboises, un bougainvillée, un finger lime ou que sais-je encore.

Force est de constater en tout cas que, cette année, si les gènes de Tistou les pouces verts ne passent toujours pas vraiment par nous (LeGB s’inscrit en faux, son système d’arrosage automatique du jardin fonctionne rudement bien) (tous en chœur : quel homme, ce LeGB, quel homme !) (allez, allez, on ne lambine pas sur les compliments) (sinon, imaginez un peu, en guise de représailles, c’est LaGB qui va se retrouver de corvée de vaisselle) (horreur, misère et liquide vaisselle), la presque autosuffisance alimentaire pour au moins une demi-journée est au bout de la feuille. Imaginez un peu : l’aubergine attaque sa cinquième fleur, les tomates croulent sous les fruits et le piment aussi. Bon, il faut se battre sans répit contre les chenilles qui n’ont de cesse de planter leurs crocs, qu’elles ont goulus et pointus, dans tout ce qui commence à mûrir. A croire qu’elles ont un détecteur à crise climactérique, ces redoutables et fourbes morfalettes sur beaucoup trop de pattes. Et tout de même, c’est agaçant de ne pouvoir envisager sa salade de tomates autrement qu’à trous…

Les mignonnes petites carottes rondes et dodues sont prêtes à être cuites récoltées, tout comme leurs potes les betteraves multicolores. La première saison des petits pois touche à sa fin et nous voilà à la tête d’une mirifique portée de 43 individus ronds, verts et lisses (les lois de Mendel, ça laisse des traces, on a cherché les individus jaunes et fripés) (généticiens de tous pays…). Non, non, pas 43 cosses, 43 petits pois repartis dans onze gousses (soit une moyenne franchement pas mirifique de 3,9 petits pois par gousse). Pas vraiment de quoi cuisiner donc mais nettement de quoi pavoiser malgré tout. Et puis les fraises se portent à merveille. Chaque soir, c’est le même rituel : hop, un petit tour dans le backyard, un petit coup d’œil sous les feuilles des fraisiers et le festin peut commencer sans tarder. Imaginez donc, les jours fastes, on a deux fraises grosses comme un demi-pouce à se caler sous la quenotte… Oui, décidément, l’autosuffisance alimentaire n’est vraiment plus très loin. Woolworths et le Farmers Market non plus, ça tombe bien !

10 thoughts on “Champs de fraises pour toujours

  1. Yannanaï

    Deux ans qu’on a notre équipe de vers à la maison. Le poids de la poubelle a bien diminué, elle ne sent plus mauvais en été et on récolte composte et l’engrais liquide. Que demander de plus ^^
    Bref, félicitation et longue vie aux J-R :-)

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    • lagrandeblonde Post author

      Merci, m’sieur ! Je me souviens qu’on en avait parle. Pour l’instant, on tatonne un peu mais on est ravis !

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  2. Charlotte

    Je suis jalouse !! Mes tomates sont encore minuscules et vertes (on m’a dit qu’en Australie les tomates se font toutes bouffer par la fruit fly et que j’allais en baver), les aubergines sont hautes comme mon pouce et les petits pois sont morts depuis longtemps… ok j’ai mis du temps à planter mon jardin d’été… les lombrics vont bien par contre, ils sont en ce moment même en train de se faire bercer par le chant d’un tawny frogmouth qui chante sur le toît de leur maison… cro meugnon !!
    En tout cas, bravo pour le jardin ! Ca fait rêver !

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    • lagrandeblonde Post author

      Un tawny forgmouth? C’est LeGB qui est jaloux, pour le coup !
      Pour l’instant, les tomates resistent a l’envahisseur la mouche mais pas aux chenilles… Pourvu que ca dure !

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  3. Ampelopse

    Alors ici…comment dire…il fait 2° en moyenne…le seul truc qui pousse (au risque de paraitre triviale) c’est mon poil aux pattes, et ça réchauffe le coeur de voir des fleurs d’aubergines, et des tomates qui sont prêtes au coup de soleil…tout ça en sifflotant les Beattles avec un plaid sur les épaules!

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  4. Cathy du Gard

    Pour avoir plus de tomates, il faut pincer entre ses doigts sans l’enlever la première fleur qui sort – je me souviens avoir acheté des graines de tomates d’origine ancienne en Australie et les avoir ramenées ici – j’en ai toujours qui ressortent, parce que je ne les ramasse pas toutes, et je laisse la nature faire … Nostalgie, quand tu nous tiens …

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      • lagrandeblonde Post author

        On se caille (well, sort of) aussi depuis trois jours, le retour aux petits matins frisquets est rude apres plusieurs jours a 35 degres…

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    • lagrandeblonde Post author

      Je note pour la technique, merci !
      On n’a pas trouve de varietes vraiment anciennes, faudra qu’on s’y penche de plus pres, j’aime bien ! Et j’aime l’idee des tomates australiennes dans ton jardin, c’est doux.

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