Quelques lieues sous la Terre
(dans les tunnels de lave, Ile de la Réunion, 27-12-2013)
Casques ? Casque !
Lampes ? Lampe !
Sac à dos ? Sac à dos !
Eau ? Eau !
Macatias et petits pâtés à la viande ? Macatias (j’ai tout boulotté les petits pâtés à la viande, pardon) (mais ils étaient trop bons, j’ai pas pu résister)
(l’histoire ne dira pas qui est l’auteur de cette phrase, pour d’évidentes raisons de confidentialité)
Pansements, boussole, fil d’Ariane, scaphandre ? Pansements, boussole, fil d’Ar… Ah non, ça, c’est pas la peine !
Filer dans les tunnels de lave (car oui, c’était bien de ça dont il s’agissait), ça se mérite, qu’on se le dise ! C’est que trainer ses guêtres dans les presqu’entrailles de la Terre, ça ne s’improvise pas tout à fait, mine de rien. Et particulièrement pas lorsqu’on a la chance de filer visiter les jupons de la Fournaise guidés par PapaLaGB…
Parce que PapaLaGB a fait partie des tout, tout premiers z’Indiana Jones des tunnels de lave réunionnais, lampe frontale vissée sur le crâne, boussole à la main et appareil photo autour du cou. Alors, forcément, les tunnels, c’est un peu son dada. Et du coup, il prépare tout au millimètre près et aux petits oignons pour que chacun puisse profiter au maximum et revenir tout mordu d’avoir joué les aventuriers de la lave perdue. De toute façon, PapaLaGB est merveilleusement fantastique, un point c’est tout.
Et c’est donc harnachés de frais, sac au dos, casque au front et crème solaire sur les ailes du nez que nous avons donc filé un beau matin, direction le sud de l’ile, vers l’Enclos et plus précisément vers la coulée de lave de 2001. Encore un peu de crème solaire et hop ! nous voilà partis, cap sur l’océan. Enfin, presque. Quelques centaines de mètres plus tard, alors que nous venions tout juste de nous faire adopter par un chien errant en quête de tendresse (et de biscuits) (autant dire qu’il a surtout eu droit à de la tendresse) (parce que, hey ! quand on joue les explorateurs du presque centre de la Terre, on ne donne pas sa ration de survie comme ça) (non mais oh !) (mémé, les orties, le spinifex, les bornes des limites, Maurice, tout ça), quelques centaines de mètres plus tard, donc, le tunnel de lave au menu du jour nous ouvrait grands les bras. Une entaille dans les méandres de lave cordée, une ou deux fougères en guise de rideau, quelques pas pour descendre dans la première salle et nous y étions…
Une grande colonne centrale, un plafond presqu’en ogives, des bancs de lave lisses, lisses, lisses pour s’installer confortablement le temps de s’habituer à la pénombre, à écouter les gouttes de pluie pliqueploquer doucement le long des racines, sur nos casques, sur la lave, partout. Il faisait bon se laisser bercer par leur doux murmure (et pousser un petit cri à chaque goutte qui échouait trop près d’une paupière, aussi). Quelques minutes plus tard, hop ! il était plus que temps de filer voir plus loin si la lave y était.
Et effectivement, elle y était… En petits dômes et en colonnes, granuleuse, lisse, piquante, aussi douce que de la soie, tachetée de racines, piquetée de bulles, façonnée en colonnades, en papier mâché, en feuillets fragiles, en Bouddha rieur, en dodo, en requin, en mouton ou en dragon, un vrai bestiaire un peu fantasmagorique, ponctué de-ci, de-là de romantiques forêts de tétons ou de délicats champs de roupettes d’excroissances rondes et poilues allant par deux.
Et elle se méritait, aussi, cette lave… C’est qu’une fois passés la première salle, plus question de penser chilling out les orteils en éventail et le casque en oreiller, les choses sérieuses commencent très vite. Et il est alors question de ramper, de sauter, de s’accroupir, de jouer les grenouilles rhumatisantes, de se tortiller pour passer dans des boyaux pas plus gros que ça et surtout tout dentelés de canines de lave acérée. En essayant de ne pas s’assommer en se relevant trop vite. C’est, qu’en plus, il n’y a guère moins homogène qu’un plafond de tunnel de lave (il semblerait que la lave, lors des coulées, dédaigne l’usage du niveau à bulle) (on ne la félicite pas) (laisser un peu de peau dans un tunnel de lave, il parait que ça porte chance) (et puis ça fait un peu Bob Morane des tropiques) (mais ça fait mal, aussi). Le tout dans une atmosphère qui frise allègrement les cent pour cent d’humidité. De quoi, très vite, ne plus savoir qui de la transpiration ou de l’humidité ambiante trace des rigoles sur sa peau. L’obscurité est totale à quelques mètres à peine, les lampes tremblent sur les murs, il n’y a plus vraiment de repères.
C’est un peu fou, vaguement angoissant parfois (claustrophobes de tous pays, unissez-vous) mais aussi et surtout rudement fantastique. C’est émouvant aussi, beaucoup, quant au détour d’une cascade de lave figée qui s’escalade accroupi, on croise un petit St Expedit niché dans une alcôve de lave, entouré de quelques bougies. Comme pour se rappeler que, pas de doute, pour trouver un autel au beau milieu de nulle part, on est bien à la Réunion !
Et puis, après quatre heures de crapahutage endiablé, il est temps de retrouver l’air libre. Il faut encore un peu ramper, s’extirper à quatre pattes, s’ébrouer et cligner des yeux. Le volcan n’a pas bougé, l’océan non plus, il ne s’est écoulé qu’à peine un tout petit kilomètre… De quoi rajouter encore un zeste d’incroyable à ce petit tour sous la Terre, de quoi, surtout, se dire que PapaLaGB est décidément rudement trop fort. Et de quoi aussi se dire que, mazette, il est rudement temps d’aller grignoter un bout. Il faudrait voir à ne pas faire attendre le carri trop longtemps, non mais !
PS : il y a aussi des tours organisés pour visiter les tunnels de lave, en petits groupes. Bon, c’est sans PapaLaGB et ça, c’est pas d’bol mais c’est très bien quand même, hein !
Tes photos de lave bleutee sont magnifiques….mais d un fort avis commun, nous nous contenterons de la lave de la surface de la terre…meme si nous sommes certains de la grande valeur du guide!
Grace a toi, c est un peu comme si nous l avions fait, odeurs, et humidite en moins…mais j ai deja du mal dans un parking souterrain, ou pour envisager de prendre le metro…alors le tunnel de lave…
J moins 26!
Alors, a J+beaucoup trop (comment ca, j’ai mis du temps a repondre ?), ces tunnels ? Et la Reunion en general ?
Coucou
Tu racontes vachement bien on s’y croirait encore… Je te piquerai tes photos à l’occasion car j’en ai pas fait de si belles Moi j’ai adoré les tunnels. Mais on n’a pas crapahuté quatre heures.
Bises
Merci beaucoup ! On a eu une chance folle, pas beaucoup de monde et un guide -forcement fantastique- qui connait le coin comme sa poche…